La très populaire série médicale Dr. House parle de science, et c'est visiblement de la fiction, mais est-ce pour autant de la science-fiction ? Absolument. Et voici pourquoi.
1. Le sujet de la série est la science spéculative
Stanley Schmidt, éditeur de la vénérable revue hard-science Analog, nous a donné sa définition de la science-fiction à la WordCon le mois dernier. Pour lui, la SF "met l'accent autant sur la science que sur la fiction" et contient "un élément de science ou de technologie spéculative" tout en restant crédible. Par exemple, le livre Des fleurs pour Algernon (de Daniel Keyes, ndt), qui raconte une expérience médicale visant à transformer un handicapé mental en génie, relève clairement de la science-fiction.
La définition de Schmidt montre bien en quoi Dr. House peut être qualifiée de série SF. La quasi totalité des épisodes sont centrés sur un mystère médical fascinant qui doit être résolu en utilisant la science de façon relativement crédible. Et pourtant, la médecine déployée dans la série est bien souvent spéculative - en fait, la médecine spéculative est essentiellement la spécialité de House. Il doit trouver un remède à des maladies originales auxquelles personne n'a jamais eu vraiment affaire avant lui.
Évidemment, House n'a jamais élevé le QI de personne de 100 points en seulement quelques semaines, mais il a fait des choses toute aussi spéculatives. Par exemple, l'épisode où il réalise qu'une enseignante incroyablement patiente et gentille souffre en fait d'une maladie du cerveau qui la pousse à pardonner plus facilement que les gens ordinaires ? Celui où il diagnostique un cancer de la poitrine dans le genou d'une femme ? Celui où il arrive à convaincre tout le monde qu'une femme est tombée enceinte par parthénogenèse ? Celui où il réalise ce qui ne va pas chez une femme tombée dans le coma en Antarctique en demandant à son petit ami de boire son urine puis en perçant un trou dans son crâne ?
Personne ne me contredira si je dis que ces épisodes relèvent de la science spéculative, n'est-ce pas ?
2. L'intrigue secondaire est un classique de la SF
Maintenant que House a une "Amber" dans la tête, il est devenu comme le Gaius Baltar de Battlestar Galactica qui a une "Six" dans la tête. Ou comme le Crichton de Farscape qui un "Scorpius" dans la tête. Curieusement, les séries de SF aiment créer des versions "dans la tête" des méchants et Dr. House n'échappe pas à la règle. La femme que House ne connaissait autrefois que sous le surnom de "abominable garce" (et comme la petite amie de son copain Wilson) vit à présent dans sa tête, et elle est plus effrayante et plus salope que jamais.
3. Tous les mystères nécessitent un laboratoire pour être résolus
Beaucoup de gens disent que Dr. House est plus une série policière qu'une série hospitalière, mais les intrigues policières sont aussi choses courantes dans les annales de la science-fiction. Asimov a écrit toute une série à propos d'un détective et de son assistant robot ; le dernier China Mieville, The City & The City (non paru en France, ndt) est un roman policier. Et ce ne sont que quelques exemples parmi beaucoup d'autres. Ce qui fait de House un détective de SF plus que n'importe quel autre inspecteur de série télévisée est que tous les mystères auxquels il est confronté nécessite un laboratoire pour être résolus.
Cela pose aussi la question de savoir si CSI Les Experts est une série de SF. La réponse est non.
4. Les relations humaines dans la série semblent illustrer des principes scientifiques, et réciproquement.
Une des choses que House fait particulièrement et douloureusement bien, c'est dévoiler au grand jour l'hypocrysie des relations humaines en prétextant de dévoiler le corps de quelqu'un qui perd sa peau ou qui vomit quelque chose de plus crade que du sang. C'est, comme le dit Schmidt, la marque de fabrique d'une bonne histoire de science-fiction.
Très souvent, les conflits entre les personnages font écho à ceux des patients : l'acerbe Dr. House doit soigner une femme dont la maladie la rend trop gentille ; ou bien cet épisode à propos d'un prêtre mourant d'une maladie aux symptômes imitant ceux du SIDA et qui devient une étrange réflexion sur les maltraitances d'enfants au sein de l'Église Catholique. Et bien évidemment, dans chaque épisode, les relations bancales et agonisantes des personnages se reflètent les corps brisés ou pris de convulsions qu'ils doivent soigner.
5. Le héros est un savant fou.
Nous avons toujours su que House était furieux, colérique, grognon, méchant et cruel. Mais à présent, il est clairement devenu cinglé : il a subi des hallucinations durant une saison entière et ses visions deviennent de plus en plus bizarres. Il a d'abord eu Amber dans sa tête, qui n'était pas simplement un signe de la folie de House, mais aussi une représentation de son génie. Ses conversations avec elle, comme il le dit lors de l'un de ces échanges, sont littéralement des visions de ce qu'il fait quand il cherche la solution d'une énigme et l'examine sous plusieurs angles. House est la parfaite incarnation du savant fou, ce personnage dont la folie est indissociable de son génie. Et à présent, le voilà dans un hôpital psychiatrique, où l'on peut espérer qu'il exercera sur ses camarades pensionnaires et diagnostiquera des infirmières enceintes du genou.
Source : io9.com
