Et Clark Ashton Smith?

Angarth
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Et Clark Ashton Smith?

Messagepar Angarth » 26 novembre 2015 à 21:43

Bonjour. Désolé par avance si ce sujet, à destination de l'équipe du Bélial, a un goût de déplacé, mais je suis de ceux qui voient en C A Smith un zénith littéraire et un artiste unique, et l'idée de sa publication fut posée chez vous à partir de 2012. Ce qui motive ce post, c'est cette attente et cette hésitation qui dure depuis des années :
- acheter ses livres d'occasion à un prix impossible... au risque qu'on se mette enfin à le publier demain
- continuer à attendre... au risque que pour finir on ne le trouve plus du tout, et ne garder à jamais qu'un trop bref aperçu de son oeuvre
Vous conviendrez que dans la circonstance, pour un fan de l'auteur, maintenir le doute relève de la torture.

Bref, je ne sais trop de quel secret s'habillent les maisons d'édition (une réponse en privé...?), mais j'essaierai quand même : faut-il ou non abandonner l'idée que l'oeuf sorte, quelles sont les chances, que se passe-t-il donc dans les coulisses?
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Olivier Girard
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Re: Et Clark Ashton Smith?

Messagepar Olivier Girard » 26 novembre 2015 à 22:52

Angarth a écrit :Bref, je ne sais trop de quel secret s'habillent les maisons d'édition (une réponse en privé...?), mais j'essaierai quand même : faut-il ou non abandonner l'idée que l'oeuf sorte, quelles sont les chances, que se passe-t-il donc dans les coulisses?
On ne révèlera pas ici les coulisses, non, mais abandonner l'idée que l'œuf sorte, certainement pas...
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Tétard
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Re: Et Clark Ashton Smith?

Messagepar Tétard » 01 janvier 2016 à 11:09

Bonjour,
J'aimerais poser quelques questions sur le financement de l'édition, au-delà mais en partant tout d'abord de C. A. Smith et du Bélial :

Si les projets du Bélial autour de Niven/Pournelle et de C. A. Smith prennent tant de temps, est-ce :
1) Faute de traducteur compétent et disponible (mais, pour le Niven/Pournelle, l'ancienneté du projet me fait douter de la pertinence de cette explication) ;
2) Faute de fonds propres suffisants au Bélial pour financer ces publications et en particulier la traduction ;
3) Par crainte que ces projets ne soient pas rentables ;
4) Pour des raisons d'insertion dans un calendrier de publications (mais voir objection 1) ;
5) Autre(s) motif(s) (obtention des droits, etc.) ?

Et plus généralement, en ce qui concerne les petits et moyens éditeurs de l'imaginaire (et non seulement le Bélial) :
1) Les publications sont-elles toujours effectuées sur fonds propres, ou bien les éditeurs peuvent-ils, pour tel ou tel ouvrage, faire un emprunt bancaire afin de financer la publication, en espérant que les recettes couvrent l'emprunt initial ?
2) Et, quel que soit le mode de financement, les éditeurs ont-ils la possibilité de souscrire des polices d'assurance sur tel ou tel ouvrage (ou bien sur l'ensemble des publications d'une année) afin de couvrir les pertes éventuelles (retours et pilon) ? Je suppose que non, vu l'état de l'édition en France : alors, est-ce parce que les assureurs sont trop frileux vis-à-vis de tels risques difficiles à évaluer, ou bien parce que les primes demandées par les assureurs sont exorbitantes et ne valent la peine d'être payées que pour des publications massivement diffusées et relayées (Houellebecq, Harry Potter, Da Vinci Code, 50 nuances, etc.) ?


Toutes ces questions impudiques pour les raisons suivantes :
Nombre de projets de traductions (en particulier, mais pas seulement) échouent, sont repoussés sine die (entre autres exemples, recueils de nouvelles de Zelazny, Bester en Lunes d'encre) ou ne sont mêmes jamais envisagés (89 ans pour traduire Lud-en-Brum !). Les deux principales solutions associant le lectorat actuellement sont (j'en oublie peut-être d'autres) l'appel à souscription et le crowd-funding. Dans ces deux cas, les projets sont ceux des éditeurs (ce qui laisse de côté d'autres attentes du lectorat) ; de plus, le crowd-funding tel qu'il est utilisé par exemple par Les moutons électriques ne permet pas de s'assurer le soutien des lecteurs prêts à souscrire 30 € pour un futur livre vendu 30 €, mais pas à payer 10 € pour un marque-page (je suis prêt à faire des dons à un éditeur associatif, mais pas à un éditeur à but lucratif).

Aussi me demandé-je si une association ayant pour objet le soutien à l'édition des littératures de l'imaginaire, et ayant pu récolter a minima quelques dizaines de milliers d'euros (ce qui doit être possible) auprès de fans et bienfaiteurs, pourrait utilement intervenir auprès d'éditeurs petits (ex. : La clef d'argent) ou moyens (ex. : Le Bélial) - soit en répondant à leurs sollicitations soit en les sollicitant directement pour leur proposer des projets qui lui tiendrait à coeur (exemple : une traduction intégrale de Limbo de Wolfe, d'Aegypt de Crowley, des oeuvres de C. A. Smith, des recueils de nouvelles) -, en leur octroyant des prêts remboursables (pour des publications précises). Cette solution n'en serait une que si la disponibilité des fonds était un problème. Si par contre les solutions bancaire et assurantielle citées plus haut sont d'ores et déjà suffisantes, et que le problème est ailleurs, cette solution n'en est pas une (si le véritable pb est celui de la rentabilité, il faudrait une fondation disposant d'un capital initial lui permettant d'accorder des dons, plutôt que des prêts, comme le CNL).
Modifié en dernier par Tétard le 01 janvier 2016 à 13:39, modifié 1 fois.
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Re: Et Clark Ashton Smith?

Messagepar Thomas Day » 01 janvier 2016 à 13:09

Tétard a écrit :Nombre de projets de traductions (en particulier, mais pas seulement) échouent, sont repoussés sine die (en autres exemples, recueils de nouvelles de Zelazny, Bester en Lunes d'encre) ou ne sont mêmes jamais envisagés (89 ans pour traduire Lud-en-Brum !).


Je réponds pour ce qui me concerne.

Le projet Bester a été gelé parce que le premier volume ne s'est pas vendu (et quand je dis qu'il ne s'est pas vendu, vu l'investissements consenti, ça a juste été une catastrophe industrielle), mais ce projet n'a pas été totalement abandonné (le cinéma est en train de rattraper l'auteur sur deux longs-métrages à gros budgets).

Pour Zelazny, j'ai fait deux volumes qui ne se sont pas vendus, qui sont l'un comme l'autre lourdement déficitaires ; il n'y avait pas d'autre solution que d'arrêter les frais et le troisième volume (pourtant signé) a été purement et simplement abandonné avant lancement de la traduction et/ou révision de traduction.

Bester/Zelazny c'est publier des livres pour 1000 lecteurs en grand format, il m'en manque 2000 à 4000 pour espérer juste être à l'équilibre.

Pour Lud in the mist, Patrick Marcel m'a donné les contacts il y a très longtemps, j'avais contacté l'agent, ce projet est resté dans mes cartons pendant de longues années (j'aime beaucoup le roman), mais les ventes en fantasy de la collection étant ce qu'elles sont (proches du néant), j'ai jamais sauté le pas (je dois avoir une liste de cinquante livres que je veux publier, mais que je ne peux pas publier dans les conditions actuelles). Parfois je le saute (ce pas décisif) : j'ai finis par acheter Arslan après dix ans environ d'atermoiements.

Lunes d'encre appartient à Denoël qui appartient au groupe Gallimard, tout projet quel qu'il soit est devenu une sorte de combat, il faut des "arguments", plutôt solides. Et depuis quelques mois, je vais au plus payant dans mes achats, je limite les risques au maximum et même en les limitant au max' je n'échappe pas à quelques sanglantes déconvenues.

Par ailleurs en ce moment, les "enchères" sont assez redoutables et comme mes petits camarades je me dois d'être particulièrement vigilant au media-related.

Je finirai sur une note positive : il n'y a jamais eu autant de bons livres à lire, me semble-t-il, mais tout ne peut pas être retraduit, traduit ou à dispo. C'est une illusion de le croire.

GD, directeur de la colletion Lunes d'encre
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Re: Et Clark Ashton Smith?

Messagepar Tétard » 01 janvier 2016 à 13:32

Merci pour cette réponse concernant les titres de Lunes d'encre, et les difficultés dont le blog notamment rend compte.
C'est la faiblesse du lectorat qui est ici pointée. Mais pour répondre plus précisément à mon questionnement, existe-t-il ou a-t-il existé des assurances pour aider les éditeurs à compenser les pertes des publications ne trouvant pas leur public ? Ou bien les éditeurs sont-il systématiquement leur propre assureur (les gains de certains ouvrages devant compenser les pertes des autres, même si j'ai bien compris que chaque livre, avant diffusion, est censé être bénéficiaire) ?
On offre de face la vérité à son égal : on la laisse entrevoir de profil à son maître.
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Re: Et Clark Ashton Smith?

Messagepar Pierre-Paul Durastanti » 01 janvier 2016 à 20:17

Sur le questionnement originel, en ce qui concerne le Bélial', c'est 4.

Et l'éditeur est son propre assureur.
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Re: Et Clark Ashton Smith?

Messagepar Algernon » 01 janvier 2016 à 20:35

Tétard a écrit :une traduction intégrale [...] d'Aegypt de Crowley


Toi, je t'aime. *__*
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Re: Et Clark Ashton Smith?

Messagepar JDB » 02 janvier 2016 à 01:20

Algernon a écrit :
Tétard a écrit :une traduction intégrale [...] d'Aegypt de Crowley


Toi, je t'aime. *__*

J'ai relu/lu l'ensemble de la tétralogie quand sont sorties les versions corrigées des trois premiers romans et le quatrième inédit.
A mon sens, le genre de livre hermétique voué en France à un échec total.
JDB
"Passablement rincé", qu'il dit.
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Re: Et Clark Ashton Smith?

Messagepar Algernon » 02 janvier 2016 à 15:55

JDB a écrit :A mon sens, le genre de livre hermétique voué en France à un échec total.


Je ne suis pas convaincu.
Publier Aegypt et Amour et Sommeil dans une collection de fantasy au côté de Tad Williams et Robert Jordan fut une grosse erreur. En poche, ce fut pire, j'ai un jour vu en librairie Aegypt coincé entre un Eddings et un Pratchett. Je vois mal comment un tel livre peut trouver son public avec de tels voisins.
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Re: Et Clark Ashton Smith?

Messagepar JDB » 02 janvier 2016 à 16:25

Algernon a écrit :
JDB a écrit :A mon sens, le genre de livre hermétique voué en France à un échec total.


Je ne suis pas convaincu.
Publier Aegypt et Amour et Sommeil dans une collection de fantasy au côté de Tad Williams et Robert Jordan fut une grosse erreur. En poche, ce fut pire, j'ai un jour vu en librairie Aegypt coincé entre un Eddings et un Pratchett. Je vois mal comment un tel livre peut trouver son public avec de tels voisins.

Tu mets de l'eau à mon moulin. C'est un projet pour un éditeur de littérature générale un peu excentrique. Tout comme l'eût été, en son temps, Le Quatuor de Jérusalem. Gérard Klein a eu le courage de le publier, mais il n'aurait pas dû le faire en "Ailleurs et demain" (cela dit, peut-être que c'était ça ou rien).
Et en dépit d'une presse élogieuse, le Quatuor s'est si peu vendu, et a subi une telle attrition des ventes (à peine 1500 ex. pour le dernier, si ma mémoire est bonne), que personne n'en a voulu en poche.
JDB
"Passablement rincé", qu'il dit.

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