Savage
Scénario : Pat Mills
Dessin : Charlie Adlard
Traduction : Nick Meylander
Lettrage : Moscow*Eye
Editions Delcourt
Rebaptisée la République Volgane, l’ex-Russie a passé un accord avec les États-Unis dans une sorte de nouveau Yalta, afin de se partager le monde. Mais les pays libres et le Royaume-Uni refusent cette nouvelle donne et la résistance se met en place. 2004 : Les Volgans ont envahi l’Angleterre. Un certain Bill Savage se bat contre l’oppresseur. Une atmosphère de guerre et de guérilla envahit l’Albion.
.... L’invention, la création est de mon point de vue, et à bien des égards, un miroir aux silhouettes.
Et ce n’est pas la préface de Pat Mills - scénariste reconnu et l’un des hommes clés à l’origine de l’hebdomadaire de BD 2000AD (Pour en savoir +) - qui me contredira, lui qui y déclare s’être inspiré de Jack Carter, personnage inventé par le romancier Ted Lewis, pour son propre personnage Bill Savage.
Le roman de Lewis, Jack's Return Home - disponible chez l'éditeur hexagonal Rivages - (1970) est sûrement plus connu au travers de son adaptation cinématographique, portée à l’écran l’année suivante sous le tire original de Get Carter (La Loi du milieu) et réalisé par Mike Hodges avec Michael Caine dans le rôle principal.
Toutefois Bill Savage a failli ne pas voir le jour.
.... En effet au moment de réfléchir au contenu de l’hebdomadaire que l’éditeur IPC est en train de concevoir et qui deviendra 2000AD donc, John Sanders suggère une série, baptisée Invasion, qui raconterait justement l’invasion de la Grande Bretagne par les troupes Russes.
Pat Mills n’est pas très enthousiaste jusqu’à ce que l’éditeur propose de montrer dès le premier épisode l’exécution de Margaret Thatcher devant la cathédrale Sain Paul (de Londres) c’est du moins l’argument qu’avance David Bishop dans son étude sur l'hebdomadaire britannique.
Si M. Thatcher n’est pas, au moment de la création de 2000AD, encore Premier ministre elle est néanmoins déjà à la tête du Parti conservateur.
Le premier scénario est donc envoyé à un artiste mais son travail n’est pas suffisamment convaincant ; Villagran c’est son nom, le redessine mais là encore il ne convient pas.
Finalement c’est un dessinateur de l’agence Bardon qui s’y collera, et son travail sera jugé satisfaisant.
L’histoire n’a à ma connaissance, pas retenu son nom.
Tout au long de ce processus artistique, des remaniements, notamment au niveau de la violence – l’arrêt de l’hebdomadaire Action est encore dans toutes les mémoires (Pour en savoir +) – seront apportés jusqu’au dernier moment, juste avant de mettre sous presse (Cf. Thrill-power overload par David Bishop).
Finalement le premier épisode sortira dans le premier numéro de 2000AD le 26 février 1977.
Trois ans plus tard Invasion est publiée dans l’Hexagone.
.... Au cours des années 1970 et au début des années 1980 notamment, les lecteurs français sans qu’ils le sachent forcément ont droit à des histoires de bandes dessinées qui viennent des quatre coins de l’Europe : Angleterre, Italie et Espagne grâce à ce qu’on appellera plus tard les « petits formats » (PF), et Invasion ne déroge pas à la règle puisqu’il est publié dès juin 1980 dans Force X, qui deviendra dès le numéros suivant sans qu’on sache pourquoi Super Force (14 numéros).
Ce « petit format », publié par l’éditeur Aventures et Voyages (plus connu sous le nom de Mon Journal), de 128 pages (et de 130x180 cm) accueillera par ailleurs dans son numéro 11 le ‘maintenant) célèbre Judge Dredd.
Petit format mais aussi petit prix.
Le numéro de Force X coûtait à l’époque 3,50 francs soit l’équivalent en 2015 de 1,46 € calcul fait, compte tenu de l'érosion monétaire due à l'inflation.
Difficile de trouver de la bande dessinée à ce prix-là aujourd’hui.
Pour mémoire ce qui se fait sûrement de moins cher de nos jours est soit le Journal de SPIROU qui coûte 2,40 € et le Journal de MICKEY qui lui vaut 2,90 €.
.... Bill Savage est un personnage comme les affectionne Pat Mills : un prolétaire à qui on ne dicte pas sa conduite, et un anti-héros.
C’est-à-dire un personnage qui fait le Bien malgré lui au travers notamment de ses propres combats ; qui combat la hiérarchie et l’ordre lorsqu’ils sont imposés et iniques, bref qui combat le « système » en place avec la même pugnacité que s’il était lui-même un « méchant ».
L'exécution en question
.... La guerre que mène Savage ne se fait pas « en dentelle », tous les coups sont permis et que le plus retors gagne.
Pat Mills en vieux routier de la BD qu’il est sait toutefois inventer des personnages suffisamment riches qui ne tombent jamais (ou presque) dans le manichéisme.
Tout salaud qu’il soit un personnage à des raisons de l’être ; le scénariste laisse au lecteur d’approuver ou non ses agissements.
Du moins lui laisse-t-il croire.
(À suivre …..)