jdb a écrit : Je pense que nous n'avons pas la même approche de la "fantasy"
D'où l'intérêt d'en débattre !
pour moi, la définition de ce genre littéraire (et de tous les autres aussi, mais
restons-en là) est conséquence du rapport au monde que peut avoir une société donnée à
une époque donnée. Dire que Homère et Shakespeare étaient des auteurs de fantasy
(à leurs yeux et à ceux de leur époque) est pour moi un non-sens.
Pourquoi ? Tu crois qu'Hésiode pensait sincèrement rapporter une vérité théogonique
à lui directement transmise par d'authentiques Muses incarnées ? Ou que Bill
Shakespeare croyait plus littéralement en l'existence des fées que, disons,
Catherine Dufour ?
Ils jouaient à créer des univers magiques, cohérents mais soumis à des lois naturelles
différentes des nôtres, et informés par les mythologies de l'époques pour mieux en jouer.
Supposer que leurs lecteurs n'en étaient pas pleinement conscients, au contraire des lecteurs
de fantasy contemporaine, reviendrait à considérer ces derniers comme plus intelligents
et sophistiqués que les Grecs de l'Athènes de Périclès ou que l'élite culurelle de l'Angleterre
d'Elisabeth, simplement parce qu'ils arrivent après eux. C'est peu dire que je n'y crois pas.
les possibilités s'ouvrant à un auteur américain des années 40-50 souhaitant oeuvrer
dans l'imaginaire étaient nécessairement limitées, en théorie (qu'écrire ?) et en pratique
(comment faire publier ce qu'on a écrit ?).
La SF n'était pas seulement le genre dominant "dans le fandom naissant", mais dans
l'édition professionnelle : Weird Tales a cessé de paraître en 1954 (date approximative)
et, à cette époque, les revues estampillées fantastique/merveilleux étaient quasiment
inexistantes.
C'est un peu circulaire : tu définis, à la Spinrad, la fantasy par ce qui est publié sous cette
estampille (je n'ai jamais bien compris ce qu'on entendait par "imaginaire" dans ce contexte).
Il y avait bien d'autres supports professionnels en-dehors de ce petit milieu SF/fantasy
(et assimilables), et qui payaient bien mieux. S'y inscrire était un choix délibéré.
Je termine en reconnaissant que ma conception résulte sans doute de mon âge ;
quand on a découvert ces genres à une époque où la fantasy asseyait sa domination,
on a sans doute une autre vision.
Bah... Je suis assez vieux pour que l'une des influences marquantes de mon "imaginaire"
intime soit l'image grésillante d'Armstrong sur la Lune. Et il me semble que la question
ne se pose que dans une définition très limitative de la fantasy. De mon point de vue,
j'en ai été nourri de la même façon que les générations précédentes, en "faisant" mes
"humanités", comme on ne dit plus guère, où Shakespeare & co tenaient une place
de premier plan.