Gromovar a écrit :[...]il est clair que je n'aime pas les histoires dans l'histoire quand elles ne servent pas l'histoire principale ou seulement de manière très indirect
C'est là qu'on diverge.
Parce que pour moi, plus que perdre de son sel en se voyant amputé d'un aspect fascinant (intertextualité, mise en abyme), Zendegi n'est tout simplement pas le même livre si on le lit avec ou sans ces références là à l'esprit.
Comme beaucoup de monde je pense, Ferdowsi et son Shâh Nâmeh, je n'en avais jamais entendu parler et sans recherches sur le net, cet aspect de Zendegi me serait totalement passé au dessus de la tête.
Et là, il est possible en effet que les parties de RV décrites me seraient apparues comme "
des pages entières de description d’une session de World of Warcraft" (je te cite) sauf qu'au préalable je suis allé fureter sur le net me documenter sur Le Livre des Rois et là, c'est plus du tout la même histoire. Parce que outre ce qu'il y décrit explicitement dans ces parties de RV le Greg, il y a tout ce background mythologique auquel il fait allusion (parfois très discrètement, au détour d'une phrase, l'air de rien). Et nanti de ces références là, on voit combien ce qui se déroule en RV est le décalque de ce qui se déroule en dehors. A tel point qu'en poussant le truc un pas plus loin, on puisse imaginer que ce qui nous est vendu comme réel l'est peut-être moins que ce qui est présenté comme son pendant virtuel (non je déconne hein, Egan n'a pas fait du Dick, simple délire perso, pardon).
Ceci dit, on pourra me rétorquer qu'un livre devrait se suffire à lui-même et qu'Egan sème ici des références des plus obscures (pour nous, riants occidentaux) mais faire l'économie de cette documentation préalable me parait une belle erreur.
Perso, outre ces recherches là, je me suis d'ailleurs pas mal appuyé sur le net pour ce bouquin : Youtube pour les chansons écoutées par Martin et Google earth pour suivre ses déambulations dans les rues de téhéran (même sans l'option street view, inactive pour l'Iran, ça le fait). Ces "gadgets" peuvent sembler de vulgaires béquilles à une imagination atrophiée mais pour moi ça a clairement boosté mon immersion dans l'histoire.
Et puisque toi et Pierre-Paul y êtes allés de vos confidences, j'avoue que si ce que j'attends de la sf est qu'elle m'ouvre sur le monde, éveille ma curiosité, me fasse sortir de mes ornières mentales et botte le cul à ma paresse intellectuelle, mes attentes ont été comblées avec Zendegi.
Gromovar a écrit :[...]Egan n'arrive pas imho (et c'est un reproche qui lui est fait depuis longtemps et par d'autres que moi) à donner de la chair à ses personnages, à les rendre aimables, à concerner le lecteur avec leur destin.
Avis assez largement partagé visiblement.
Mais pas par moi (c'est un ressenti sincère, pas un moyen de me singulariser ou de "défendre" Egan mordicus).
Gromovar a écrit :Ni Martin ni son fils ne sont entrés en moi, Egan ne les a pas fait entrer en moi, de ce fait leur destin, si tragique soit-il, m'indifférait un peu.
Et je précise que je suis père (non pas d'un mais de deux fils). Et pour aller encore plus loin, que j'ai personnellement connu un problème médical très proche de celui de Martin. Ca aurait du fonctionner. Si ça ne fonctionne pas, c'est qu'Egan a raté quelque chose.
Sans doute, oui.
p.s : je m'associe à Pierre-Paul (s'il le permet) pour te remercier de ta critique intéressante et argumentée (et des développements ici même).