L'Homme qui mit fin à l'histoire, Ken Liu (août 2016)

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Aldaran
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Re: L'Homme qui mit fin à l'histoire, Ken Liu (août 2016)

Messagepar Aldaran » 28 septembre 2016 à 16:59

Merci UbikD.
ubikD a écrit :Aldaran !! J'allais oublier. "L'Histoire est un sport de combat".

Trois « bonnes » raisons de passer mon tour...
Me reste la SF !
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ubikD
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Re: L'Homme qui mit fin à l'histoire, Ken Liu (août 2016)

Messagepar ubikD » 28 septembre 2016 à 17:35

Tu veux que je relance d'une "métaphysique" ? ^^
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Algernon
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Re: L'Homme qui mit fin à l'histoire, Ken Liu (août 2016)

Messagepar Algernon » 28 septembre 2016 à 17:46

ubikD a écrit :J'attends ta note dissonante (ou pas) sur ce forum ou sur mon blog dithyrambique ^^ (qui après tout est aussi un espace d'échanges), avec les armes qui te conviendront ^^.


Ah. J'envisageais plutôt d'éviter le passe d'armes car je me suis aperçu après lecture qu'il y avait beaucoup à dire et vous le savez je fais plutôt dans le laconisme. Enfin, soit, allons-y, j'accepte le défi et prends bien évidemment la plume comme arme.

La note sera semi-dissonante.

Bon, d'abord, concernant la cible confuse, je ne suivrai pas Thierry sur ce terrain. Si je suis d'accord avec l'idée qu'il y a plus de noblesse d'âme (oh, j'ai enfin réussi à placer l'expression dans une phrase!) à s'attaquer aux crimes que son peuple a commis qu'à ceux qu'il a subis, je ne pense pas que l'on puisse reprocher à Ken Liu de s'être trompé de cible. Le sujet est tellement fort et si peu discuté qu'il mérite bien d'être le cœur de ce récit. Ken Liu n'oublie d'ailleurs pas les Tibétains cités à deux reprises, la seconde où il est dit qu'ils veulent - comme d'autres groupes sur la planète - le droit d'utiliser la machine.

Par contre, je rejoins Thierry sur la sécheresse du style. Surtout dans les premières pages. J'ai eu beaucoup de mal à entrer dans le récit, à l'inverse d'Un pont sur la brume que j'ai lu d'une traite. Les explications scientifiques et historiques étaient particulièrement lourdes à digérer. Je comprends l'intérêt du style documentaire qui sert parfaitement le récit mais ça n'a pas pour autant été un plaisir de lire une telle prose.

(À ce propos, j'ouvre une parenthèse, cette histoire de particule double qui permet d'observer le passé n'a-t-elle pas déjà servi dans une autre histoire de science-fiction ? Je suis certain d'avoir déjà lu quelque chose là-dessus mais impossible de me rappeler quoi. Si quelqu'un a une idée...)

Deuxième reproche au livre : l'immense naïveté d'Evan qui croit que le témoignage totalement invérifiable de proches des victimes obtenus grâce à une machine dont seuls deux scientifiques semblent comprendre le fonctionnement puisse convaincre le Japon de reconnaître ses torts. Là, j'étais bouche bée devant une telle incrédulité. Évidemment, de par mes modestes connaissances en Histoire, je connaissais déjà l'existence de l'Unité 731, il ne me viendrait pas à l'idée de remettre en question son existence, mais si je n'en avais jamais entendu parlé et que je devais me fier uniquement aux témoignages de tels "voyageurs temporels", alors j'ignore si je les croirais aussi facilement.

D'ailleurs, deuxième naïveté de d'Evan, il dit à un moment (vous m'excuserez de ne pas avoir pris de notes des pages) qu'il souhaite seulement la reconnaissance des crimes du Japon pour aider les familles des victimes mais comment peut-il croire qu'une telle reconnaissance n'ouvrirait pas la porte à d'interminables demandes de réparations. Attention, je ne dis pas que de telles demandes sont injustifiées, je dis seulement qu'il est crédule de croire que des victimes ou des proches de victimes vont se contenter d'une reconnaissance officielle et de belles excuses en bonne et due forme.

Alors, je ne vais pas dire que je n'ai pas aimé ce livre, c'est faux, le sujet est passionnant et m'a poussé à de nombreuses réflexions en particuliers sur l'Histoire et la mémoire tant individuelle que collective. Peut-on faire plus belle éloge d'un livre que dire qu'il provoque la réflexion ? Mais à cause de son style et de la naïveté incroyable de son "héros", il m'est impossible de le considérer comme un chef-d’œuvre. J'ai vu que beaucoup se sont amusés à comparer L'homme qui mit fin à l'Histoire et Un pont sur la brume, en ce qui me concerne, le second l'emporte aux points.
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Re: L'Homme qui mit fin à l'histoire, Ken Liu (août 2016)

Messagepar ubikD » 28 septembre 2016 à 18:12

(À ce propos, j'ouvre une parenthèse, cette histoire de particule double qui permet d'observer le passé n'a-t-elle pas déjà servi dans une autre histoire de science-fiction ? Je suis certain d'avoir déjà lu quelque chose là-dessus mais impossible de me rappeler quoi. Si quelqu'un a une idée...)

Lumières des événements de Greg Egan me semble assez proche. J'y ai pensé un instant.

Merci de ton avis Algernon.
Je te rejoins sur la naïveté de Evan. C'est d'ailleurs pour cette raison que sa croisade morale échoue.
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Re: L'Homme qui mit fin à l'histoire, Ken Liu (août 2016)

Messagepar ubikD » 28 septembre 2016 à 18:20

« Un demi-million de personnes massacrés. Ce n'était pas la fatalité, ni le destin — il n'y avait pas de Volonté de Dieu, pas de Sens de l'Histoire pour nous absoudre. Cela venait de ce que nous étions : des mensonges que nous avions racontés, et continuerions de raconter. Un demi-million de personnes massacrés dans les interstices entre les mots. »

Greg Egan

ça calme tout net.
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Re: L'Homme qui mit fin à l'histoire, Ken Liu (août 2016)

Messagepar Aldaran » 28 septembre 2016 à 18:53

Merci pour le retour, Algernon.

De mon côté, je n'ai pas vu de réelle naïveté dans le personnage d'Evan. Piégé dans ses sentiments, oui, et « obligé » d'aller au bout de sa démarche (bon, cette dernière est un échec... cuisant). Confronter sa manière de voir les choses et celle de son épouse me semble important. On peut penser ce qu'on veut d'eux, à mes yeux, leur honnêteté les sauve.

En tout cas, c'est bien cool d'échanger plutôt que d'enchaîner les lectures d'avis sans plus de discussion.
Merci.
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Re: L'Homme qui mit fin à l'histoire, Ken Liu (août 2016)

Messagepar Algernon » 28 septembre 2016 à 20:31

Un troisième exemple de naïveté, peut-être pire que les deux autres, elle m'avait frappé, je l'avais oubliée et maintenant j'y repense. Page 36 :

Evan estimait que le voyage dans le temps sensibiliserait les gens.
Tant que le Darfour restait un nom sur un continent lointain, on pouvait ignorer les morts, les atrocités. Mais si vos voisins vous disaient ce qu'ils avaient vu lors de leurs voyages là-bas ? Si les parents des victimes venaient vous raconter leurs souvenirs de ce pays ? Pourriez-vous continuer d'ignorer la situation ?
Evan croyait qu'il se produirait une prise de conscience de cet ordre avec le voyage dans le temps. Voir et entendre le passé vous interdirait de rester apathique.


Une telle naïveté est à peine croyable. À défaut de voir et entendre le passé, nous voyons et entendons aujourd'hui le présent. Le monde est connecté et en quasi direct le spectateur européen assiste aux pires malheurs du monde. Un enfant échoué mort sur les plages d'Europe ? Clic, clac, une photo. Un enfant blanc de poussière, rouge de sang, sorti des décombres de sa maison bombardée par un tyran ? Et hop en vidéo sur YouTube. Une femme, le sein nu rachitique, désespéré de ne pouvoir nourrir son enfant famélique ? Retrouvez l'histoire de tout son village en reportage photos dans Paris Match. Jamais l'information n'est aussi bien passée entre les continents. Et pour quels résultats ? Avez-vous seulement l'impression que les peuples d'Europe sont prêts à se soulever pour exiger de leurs dirigeants de mettre fin aux guerres, de nourrir les affamés et de soigner les malades ? Oh, je ne jette pas la pierre à mes compatriotes, moi-même quand Saint-Pierre me demandera ce que j'ai fait de bien pour mon prochain, la liste ne sera pas bien longue. Mais on revient à ce que je disais plus haut, croire que quelques témoignages de crimes passés peuvent bouleverser les mentalités alors que l'information des crimes présents nous submergent est une naïveté démentielle.

Aldaran a écrit :De mon côté, je n'ai pas vu de réelle naïveté dans le personnage d'Evan. Piégé dans ses sentiments, oui, et « obligé » d'aller au bout de sa démarche (bon, cette dernière est un échec... cuisant). Confronter sa manière de voir les choses et celle de son épouse me semble important. On peut penser ce qu'on veut d'eux, à mes yeux, leur honnêteté les sauve.


Alors, oui, je suis d'accord, la démarche d'Evan est honnête mais je suis sans doute trop froid, trop rationnel - ou pas assez émotionnel -, pour estimer que l'honnêteté suffit à sauver un homme d'un tel échec. Si le livre était une histoire vraie, il serait pour moi le récit d'un formidable gâchis.

Aldaran a écrit :En tout cas, c'est bien cool d'échanger plutôt que d'enchaîner les lectures d'avis sans plus de discussion.


Oui, c'est vrai, je suis tout à fait d'accord, il ne me déplairait pas que quelques uns d'entre nous, nous nous mettions d'accord pour lire régulièrement un livre dans un même laps de temps pour pouvoir ainsi en discuter réellement ensemble mais à l'ère des blogs où les internautes préfèrent être les rois de leurs petits espaces individuels je doute que ça intéresse grand monde.

ubikD a écrit :
(À ce propos, j'ouvre une parenthèse, cette histoire de particule double qui permet d'observer le passé n'a-t-elle pas déjà servi dans une autre histoire de science-fiction ? Je suis certain d'avoir déjà lu quelque chose là-dessus mais impossible de me rappeler quoi. Si quelqu'un a une idée...)

Lumières des événements de Greg Egan me semble assez proche. J'y ai pensé un instant.


Ça fait bien longtemps que je n'ai plus ouvert un Greg Egan. Je note cette nouvelle pour relecture. Merci du conseil.
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Re: L'Homme qui mit fin à l'histoire, Ken Liu (août 2016)

Messagepar PascalG » 28 septembre 2016 à 20:45

Et si, Algernon, à chaque fois que tu emploies le mot "naïveté" on mettait le mot "idéalisme" ? Je n'affirme rien, mais... je me demande.
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Re: L'Homme qui mit fin à l'histoire, Ken Liu (août 2016)

Messagepar Algernon » 28 septembre 2016 à 20:48

PascalG a écrit :Et si, Algernon, à chaque fois que tu emploies le mot "naïveté" on mettait le mot "idéalisme" ? Je n'affirme rien, mais... je me demande.


Oui, ben, c'est de l'idéalisme naïf. Je ne vois pas de contradiction entre les deux. De même, on peut être idéaliste et rester un chouïa rationnel. De nombreux chemins mènent à un idéal. Et celui choisit par Evan l'a conduit à un échec. Je ne dis pas que les autres chemins l'auraient mené à un succès. Je n'en sais rien évidemment. Mais sa naïveté répétée n'en reste pas moins horripilante.
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Re: L'Homme qui mit fin à l'histoire, Ken Liu (août 2016)

Messagepar Apophis » 28 septembre 2016 à 20:52

Algernon a écrit :Oui, c'est vrai, je suis tout à fait d'accord, il ne me déplairait pas que quelques uns d'entre nous, nous nous mettions d'accord pour lire régulièrement un livre dans un même laps de temps pour pouvoir ainsi en discuter réellement ensemble mais à l'ère des blogs où les internautes préfèrent être les rois de leurs petits espaces individuels je doute que ça intéresse grand monde.


Ça s'appelle une Lecture Commune, et ça se fait très régulièrement et généralement... entre blogueurs.

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