Ray Bradbury est-il un vieux con ?

[Clément]

« To hell with the Internet » s'est exclamé Ray Bradbury la semaine dernière. L'auteur des Chroniques martiennes en a-t-il assez du troll sur le forum du Cafard cosmique ? Non, c'est à Yahoo, qui souhaitait proposer en ligne l'un de ces livres, que s'adressait cette invective.



Internet ? Ne le lancez pas sur le sujet. « Internet est juste une grosse distraction » dit Bradbury. « Ce n'est pas réel. C'est quelque part dans les airs. »

Autant pour ceux qui voyaient son roman Fahrenheit 451 comme une apologie de la liberté d'expression contre le totalitarisme des Etats qui veulent contrôler la diffusion des connaissances. « Fahrenheit 451 n'est pas une histoire à propos de censure gouvernementale, ni une réponse au maccarthysme » comme l'affirment critiques et essais sur le sujet depuis des années, y compris Sam Weller, dans The Bradbury Chronicles, sa biographie autorisée.

Pour Bradbury, qui vit à Los Angeles, centre industriel et créatif de la télé-réalité et des séries télévisées, c'est en réalité une diatribe contre la télévision, qui détruit l'intérêt pour la lecture. On se souvient en effet, dans Fahrenheit 451 de "La Famille", ces écrans géants qui couvraient les murs et préfiguraient en quelque sorte la télé-réalité.

« La télévision vous donnent les dates de Napoléon, mais ne vous dit pas qui il était. » affirme Bradbury, face à son écran plat géant diffusant Fox News en sourdine, résumant le contenu de la télévision à un simple mot qu'il crache comme une épithète : « Des racontars. ». Sa crainte que, en 1953, la télévision tuerait le livre, a été selon lui partiellement confirmé par son effet sur la substance de l'actualité. « Ca ne sert à rien. Il vous bourrent avec tant d'informations que vous vous sentez plein. »

Pour Brabdury, Internet n'est que rien d'autre que l'évolution technologique de la télévision. Il défend toujours le bon vieux livre papier contre tout autre forme de média. C'est pourquoi il milite pour l'ouverture d'une bibliothèque publique et gratuite à Ventura County. « C'est dans les bibliothèques que j'ai été élevé. » raconte Bradbury. « Je ne crois pas aux universités et aux grandes écoles. Je croyais aux bibliothèques parce que la plupart des étudiants n'ont pas d'argent. Quand j'ai passé mon bac, c'était à l'époque de la grande dépression, et nous n'avions pas d'argent. Je ne pouvais pas aller à l'université, alors je suis allé à la bibliothèque trois jours par semaine durant dix ans. »

« Yahoo m'a appelé il y a huit semaines. » raconte Bradbury. « Ils voulaient mettre un de mes livres sur internet. Vous savez ce que je leur ai répondu ? Allez au diable. Allez au diable, vous et l'internet. »



Source : New York Times & Los Angeles News

[scifictif]

Ray Bradbury : "L'appareil de télévision, cette bête insidieuse, cette Méduse qui fige des millions et des millions d'hommes, chaque soir, les transforme en statues éblouies, cette Sirène qui chante, appelle, promet tant et donne en définitive si peu".
(Le criminel in Les pommes d'or du soleil).
Cette nouvelle datant de 1953, on admettra qu'il a de la suite dans les idées pépé Raymond.
Sinon, je ne vois pas bien le problème.
Sur Internet, il donne son avis. Avis qui en vaut un autre.
Sur Fahrenheit 451, on pourra gloser tant qu'on voudra, c'est lui qui l'a écrit et il sait mieux que quicquonque ce qu'il a voulu y exprimer même si ça ne correspond pas à ce que l'on a voulu y lire.

Comment ça je fais mon centriste mou ?

[Sardine Bebek]

Je ne vois pas non plus où est le problème.
Pour Fahrenheit 451 c'est toujours ainsi que je l'ai compris. Je rappel que dans le roman l'État ne brule les livres que sur demande des citoyens qui sont gênés par ce que les livres supposent de travail intellectuel. Il ne s'agit donc pas d'un récit sur le totalitarisme mais bien sur la bêtise. Truffaut n'avait rien compris au bouquin, il a induit des milliers de non lecteur en erreur (précisément ce que dit Bradbury) mais je suppose que sur ce forum il y a tout de même des gens qui l'ont lu...

Pour le reste, si Internet lui déplait c'est son droit et pour les bibliothèques je suis plutôt d'accord avec lui.

Pour autant que Bradbury soit un vieux con, c'est fort possible. J'ai sous la main le n° 44, d'avril 2004, du journal littéraire dans lequel à l'occasion de l'interview qui y est reproduite on constate qu'effectivement il a une position invariable sur la téloche, je cite, page 4 :"...prenons la télévision par exemple. la télévision est très dangereuse car elle reproduit sans cesse nos désastres au lieu de nos triomphes." et qu'il est tout de même assez radical dans son amour de l'écrit, je cite page 5 : "quel serait le grand projet de la Science fiction? celui que devrait avoir toute écriture : réapprendre à l'homme à lire et a écrire. C'est en lisant nos pensées d'hier transcrites grâce à l'écriture que nous nous rendons compte de notre stupidité et nous grandissons. Aujourd'hui l'écriture ne nourrit plus notre imagination enfermée dans les jeux vidéo. Les jeux vidéo sont une perte de temps pour les hommes qui n'ont rien d'autre à faire.

Bon je vous laisse je vais me refaire Half Life plutôt que de lire un bouquin

:)