Messagepar Casse-bonbon » 22 janvier 2011 à 15:22
D'abord, le principe des razzies n'est pas de traîner les gens dans la boue. Cette année, il y a eu de mon point de vue un plantage, parce que l'esprit même de la chose n'a pas été respecté.
L'idée à mon avis reste saine : remettre les pieds sur terre, aux uns comme aux autres, y compris aussi, parfois à ceux qui y participent. Quand Gilles se prend un razzie parce qu'il a accepté de ses patrons un bouquin qu'il n'aimait pas parce qu'il avait peur de voir celui qu'il aimait se planter et lui planter la collec, alors que c'est le contraire qui s'est passé, moi je prends ça pour un avertissement intelligent aux copains : finalement, nous dit-il en se condamnant lui-même, on ferait tous mieux d'écouter notre instinct, même si c'est parfois dur de dire merde à nos patrons. Pour ce genre de chose, c'est salutaire.
Et il y a d'autres choses qui nous font du bien : si aucune de mes conneries n'était jamais pointée du doigt, j'estimerais que je n'ai pas à m'en préoccuper, que après tout, hein ? Puisque ça passe... c'est une tendance de l'être humain à aller vers la facilité, et il est sain qu'on nous marche sur les pieds pour nous ramener à la réalité.
Condamner une bonne chose parce qu'une année, il y a eu plantage, c'est jeter le bébé avec l'eau du bain. Je râle, mais je n'ai aucune envie de voir les razzies disparaitre. Juste revenir à un peu plus de mesure.
Ensuite, non, Lunes d'Encre et le Bélial' ne se portent pas "très mal". L'année est pourrie pour toute l'édition, oui, on a perdu en global 24% de chiffre d'affaire, entre autre parce que le manque d'argent a reporté vers les poches et les soldés une grande partie de l'argent que réussissait à gagner les Grands formats. Mais dans ce contexte difficile, il est même réjouissant de voir que ceux qui s'en sortent encore pas trop mal, sont ceux qui font vraiment une oeuvre au sens éditorial du terme, à savoir justement, Lunes d'Encre et le Bélial'. Non que l'année n'ait pas été difficile, qu'elle n'ait pas donné des sueurs froides aux uns comme aux autres, mais clairement, elle aura finalement plutôt récompensé ceux qui ont tenu le coup contre vents et marées à vouloir proposer de la qualité avant tout. Qui ont pris, malgré tout, des risques que plus personne ne veut prendre ailleurs.
Je ne suis pas naïve. Je sais pertinemment que ça emmerde Gilles et Olivier d'avoir des concurrents, surtout quand les concurrents vont sur leurs plates bandes. Que leur survie peut dépendre aussi de la réussite ou du plantage de leurs concurrents, et qu'à ce compte-là, on peut découvrir que les coups de pelle dans le bac à sable peuvent s'avérer brutaux.
Sauf que ça fait aussi partie du jeu (pour peu que les coups de pelles soient distribués avec panache, ce qui, à mon avis, manquait cette année). Et que ne pas l'accepter, en l'occurrence, c'est contre-productif, et même, de mon point de vue, pardon, un peu idiot. La concurrence existe dans un système pourri, certes, mais alors, au lieu de perdre notre énergie à râler contre ce qui existe en l'état, on ferait mieux de la mettre à changer le système.
Tu veux de la fraternité ? Crée un monde plus fraternel. Au lieu de publier des bouquins, ouvre une librairie qui refuse de travailler avec la diffusion distribution, invente une autre forme de diffusion et de distribution qui n'étrangle pas les éditeurs. Si ça t'emmerde, alors désolée, mais accepte les règles du jeu.
Gilles et Oliver ont tapé sur les gros ? Oui ? Et alors, tu crois que les gros n'ont pas tapé sur eux allègrement ? Heureusement, encore qu'ils se défendent.
Ils tapent aussi sur les petits ? Et si franchement, les petits se posaient la question sérieusement de savoir pourquoi ils se font taper dessus, au-lieu de se poser en victimes ? Parce que, si tu regardes bien, tous les petits ne se font pas taper dessus, du moins, pas de la même façon, et de loin. Et pas que pour une question de taille prise dans le paysage culturel. (Je fais des généralités, là, pas un commentaire de cette année. Ne serait-ce que parce que j'ai trop peu lu de cette production là, par manque de temps et surtout d'argent, pour pouvoir juger de tout en détail)
Il y a de plus en plus de gens à vouloir prétendre que tout se vaut, et je comprends que ça puisse rendre fou furieux des gens qui se battent depuis des années pour faire en sorte de prouver que ce n'est pas le cas. Un mauvais livre vendu a quelques milliers d'exemplaires, ou à 10 000, c'est pareil. Ça contribue à rendre moins visible la qualité. Et la qualité, elle supporte bien la concurrence de la qualité, pas celle de la médiocrité qui statistiquement, fait perdre des lecteurs quand la production de qualité en manque déjà. Plus on inonde le marché de mauvais livres, plus à long terme on perd les lecteurs qui nous intéressent, les Grands lecteurs, qui se détournent d'un genre à force d'avoir du mal à y trouver leur compte. Donc ne mélangeons pas tout. Ce n'est pas un problème de petite édition, mais de qualité générale du travail éditorial fourni globalement par les uns et les autres. D'où, oui, aucune raison qu'un petit éditeur qui fait dans le médiocre soit plus a l'abri qu'un gros. Être petit ne protège pas de l'exigence, quoi, merde.
Alors, encore une fois, cette année, ça manquait de classe. Mais tout le monde, même les razzies, a le droit de se planter une année, on leur met le nez dans leur pipi et on leur tape sur le culcul avec un journal roulé, mais on va pas les abandonner au chenil, merde quoi. (Pardon pour la métaphore, j'ai deux clébars à la maison qui m'emmerdent chouilla ces temps-ce, ça déteint)
(Edit : Je connais la difficulté de suivre une conversation sur un fil de forum. Je rappelle donc que j'ai déjà dit ailleurs tout le mal que je pense de cette édition des razzies, et que ce n'est pas directement le sujet de mon message. Je n'y reviens donc pas. Je me contente d'apporter des nuances sur des points déjà évoqués ailleurs, qu'on ne m'en fasse pas reproche sans tenir compte de ce que j'ai dit précédemment, merci.)
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Casse-bonbon le 22 janvier 2011 à 15:36, modifié 1 fois.