christian a écrit :G.K. ou G.D. t'expliqueront qu'il est plus rentable de vendre 10 grands formats à 20 Euros plutôt que 40 poches à 5 Euros.
Cet exemple ne veut rien dire, même si je comprends ce que tu as voulu dire.
Il faut regarder les comptes d'exploitation des deux cas de figure pour comparer.
Si l'éditeur grand format fait un effort sur le prix, il peut avoir une marge très faible et un point mort très haut. Si l'éditeur poche maintient son tirage et gonfle le prix d'une catégorie, car il refuse de prendre un gros risque, il peut avoir un point mort bas et une marge haute. Il n'y a pas deux cas de figure qui se ressemblent.
Illustration du désastre actuel :
Soldat des brumes de Gene Wolfe (qui aurait dû sortir début février) a été bloqué par les éditions Denoël car l'ordinateur a craché que pour commencer à gagner 1 euro il fallait le vendre 44 euros pour le tome 1 et 30 sur le tome 2, sans rabats (la faute à un tirage de 3000 ex seulement, dû lui à une mise en place très faible et des perspectives de ventes équivalentes voire encore plus faibles. Sur mes précédents Gene Wolfe j'ai fait 3700 et 2700 après retours). C'est évidemment impossible de mettre ces ouvrages à un tel prix. Hier, on m'a proposé 35 et 25, sans rabats, j'ai alors milité (pour ne pas dire fighté) pour 29 et 23. Ma direction a tranché à 30 et 25, en espérant limiter les pertes. Personne n'est content dans l'histoire : ni l'agent de l'auteur, ni l'éditeur qui va perdre de l'argent, ni le lecteur qui va trouver les livres trop chers. Et en même temps, il n'y a qu'un seul coupable, un marché qui est devenu si dur qu'on ne voit plus de solutions raisonnables. La gymnastique
Soldat des brumes n'a pas pour but de gagner de l'argent, mais de limiter des pertes (de faire des calculs d'"atterrissage défavorable"). On le fait sur ce titre-là, parce que c'était trop tard pour tout arrêter (trop d'investissement en cours). Sinon, il aurait été supprimé purement et simplement. Mais tous mes titres à venir sont sous la guillotine, vont être disséqués de la même manière ; j'essayerai de sauver ce qui peut l'être, mais je me fais guère d'illusion. La seule chose qui compte désormais, c'est survivre (ou ne pas finir comme Eclipse, si vous préférez), le reste, on verra plus tard... ou jamais.
J'en suis là, et après treize années de boulot, c'est dur à avaler. Après, si on est optimiste, une qualité qui me manque, on peut se dire que c'est juste une mauvaise passe.
GD