Landernau : pour un petit point sur l’édition de genres...

[d4.M13]

Quelques réflexions après avoir lu ce fil.

J'ai la chance d'être parisien (enfin... j'ai la chance... bref) donc de trouver les "petits éditeurs" tels les Moutons Électriques ou Rivière Blanche chez un libraire spécialisé et fournisseur de café. Heureusement, car il est difficile voire impossible de se fournir dans de nombreuses villes de taille moyenne. L'éternel problème de la distribution. L'achat sur internet est faisable mais ce n'est pas la même chose et ça refroidi de nombreux lecteurs.

Bragelonne/milady c'est pour moi le Fleuve Noir du moment. Désolé Philippe (Ward) mais Rivière Blanche (rapport au Fleuve) est plus un éditeur esthète qu'un fournisseur de gros volume, tu le reconnais toi même. J'appelle un éditeur esthète, celui dont le travail éditorial se voit et s'apprécie les yeux fermés. Si j'achète un RB je sais ce que je vais y trouver, idem pour les anciens DLM ou les encore plus anciens Titres SF. Ca ressemble aux petits labels musicaux, on ne connait pas l'artiste produit mais on devine ce qu'il va nous donner.

Je ne sais pas ce que les éditeurs ici présents en pensent, mais peut-être qu'une grosse locomotive qui attire le chaland peut se révéler utile en amenant du monde à la lecture, à la SF ou la fantasy. Ce monde qui passera forcément sur des lectures plus abouties ou pointues. En ce moment, la locomotive c'est Bragelonne/milady.

Je fus stupéfait de lire les chiffres des ventes mais dans la littérature générale les chiffres semblent être de même. Mon amie est dessinatrice, sa meilleure vente est de 600 exemplaires. C'est en même temps peu et finalement pas si mal.

Maintenant, le petit paragraphe qui fâche. Il n'est pas évident pour tout le monde d'acheter des livres à plus de 25€ ou des poches à 10€.

En tout cas, sachez qu'il y a des gens qui apprécient encore le travail éditorial, les beaux livres, les découvertes, les "j'ose le sortir celui là" et qui subissent encore des horreurs même dans les grandes collections (je n'ai toujours pas digéré "Des parasites comme nous" d'Adam Johnson).

dominique

[lutrino]

Quelques réflexions après avoir lu ce fil.

En tout cas, sachez qu'il y a des gens qui apprécient encore le travail éditorial, les beaux livres, les découvertes, les "j'ose le sortir celui là" et qui subissent encore des horreurs même dans les grandes collections (je n'ai toujours pas digéré "Des parasites comme nous" d'Adam Johnson).

dominique

Salut,
Tu parles juste de la couv' du Johnson ou du roman ?

[d4.M13]

Pour te dire, j'ai trouvé la couverture sympa, la 4iem de couv. intéressante et l'entre-deux ennuyeux à mourir. J'ai été jusqu'au bout quand même, je ne critique jamais les livres que je n'ai pas terminé, mais quel pensum!
- Action qui pourrait faire passer un Inspecteur Derrick pour un Die Hard sous amphet.
- Des personnages à qui il manque un je ne sais quoi pour être attachants
- Des situations peu crédibles parfois (devant la bibliothèque si je me rappelle bien)
- Puis finalement, à la fin du livre on se dit "tout ça pour ça", j'ai attendu 125 047 pages (j'ai vraiment trouvé ça long) que ça commence et... rien !

Bref, pour moi le roman le pire que j'ai lu ces dernières années, pire que mauvais : insipide.

d4

[lutrino]

Pour te dire, j'ai trouvé la couverture sympa, la 4iem de couv. intéressante et l'entre-deux ennuyeux à mourir. J'ai été jusqu'au bout quand même, je ne critique jamais les livres que je n'ai pas terminé, mais quel pensum!
- Action qui pourrait faire passer un Inspecteur Derrick pour un Die Hard sous amphet.
- Des personnages à qui il manque un je ne sais quoi pour être attachants
- Des situations peu crédibles parfois (devant la bibliothèque si je me rappelle bien)
- Puis finalement, à la fin du livre on se dit "tout ça pour ça", j'ai attendu 125 047 pages (j'ai vraiment trouvé ça long) que ça commence et... rien !

Bref, pour moi le roman le pire que j'ai lu ces dernières années, pire que mauvais : insipide.

d4

Waouh, tu le descends bien, je trouve !
C'est marrant, j'adore Des parasites comme nous, y compris la couverture qui capture parfaitement l'esprit du roman.
On dirait du David Lodge trash pour le côté "universitaire" et du John Irving pour sa capacité à fabriquer des situations abracadabrantes. Hank Hannah est un superbe névrosé, et il y a de très bons seconds rôles. Ce qui a été rédhibitoire pour la plupart, m'a séduit : ce bouquin est foutraque, ça tire à hue et à dia, ça bavarde, c'est pynchonien. Et dans la dernière longueur, dans l'apocalypse, il acquiert une gravité d'autant plus terrifiante qu'Adams y abandonne la luxuriance et la fantaisie des deux premiers tiers de son texte.
Des parasites comme nous est un des titres les plus transfictionnels de Lune d'Encre, il aurait pu sortir dans une collection de littérature générale. Je me souviens l'avoir lu peu après Le Dernier homme de Margaret Atwood (paru chez Laffont) et préféré de loin à ce dernier (fade et convenu à mon goût).
Avec la psychose médiatique à propos de la pandémie de grippe A, je pense que je vais faire le plein d'Adams à l'occasion de l'anniversaire de Lunes d'encre histoire d'en vendre quelques exemplaires de plus (je crois que ça n'a pas été un succès).

[Thomas Day]

Avec la psychose médiatique à propos de la pandémie de grippe A, je pense que je vais faire le plein d'Adams à l'occasion de l'anniversaire de Lunes d'encre histoire d'en vendre quelques exemplaires de plus (je crois que ça n'a pas été un succès).

Le livre a été un désastre (notamment parce que je l'ai payé une fortune ; Francis Geffard d'Albin Michel le voulait et on a joué le jeu des enchères, sans savoir qu'on était l'un contre l'autre. Dans le cas contraire, nous nous serions arrangés lui et moi). J'ai eu beaucoup de mal à lui trouver un traducteur (ce qui n'est jamais bon signe)... Des parasites comme nous est un des rares livres qui m'ait fait rire ces dernières années, mais bon je dois avoir un sens de l'humour très tordu.
J'aime beaucoup aussi le recueil de nouvelles Emporium qui s'est vendu (de mémoire) à 300 ex.
J'attends le prochain roman de Johnson avec impatience.

GD, directeur de la collection Lunes d'encre

[d4.M13]

Lutrino >
Mon avis sur ce bouquin n'engage bien sur que moi. J'avoue ne pas l'avoir trouvé transfictionnel - peut être attendais-je quelque chose d'autre : le problème des collections certainement. Mais le fait que quelqu'un l'ait apprécié prouve que ce livre n'est pas intrinsèquement mauvais, il n'a pas trouvé son public en moi.
Par contre, je suis d'accord avec toi, la couverture est très belle et bonne. La tronche du pêcheur laisse à penser que le livre a une tendance à l'humour. J'ai été déçu par l'attente / le prix par rapport au plaisir de la lecture certainement.
L'autre livre qui m'a fait ça c'est "Douce apocalypse", le receuile de nouvelles de James Flint paru aux éditions du Diable Vauvert. En un mot : une escroquerie. Cher, écrit aussi gros que la bibliothèque verte et assez inintéressant (pourtant des nouvelles donc plusieurs possibilités). Pourtant, j'avais adoré et beaucoup ri en lisant "Habitus" du même écrivain chez le même éditeur, et j'ai ensuite (comme quoi je ne suis pas rancunier) adoré "Electrons libres" toujours des mêmes auteur/éditeur. Et là, c'est vraiment du transfictionnel.
J'ai pas mal écrêmé "Au diable vauvert", on y trouvait énormément de bonnes choses à une époque et leur maquette est somptueuse.

Thomas >
Je dois avoir pas mal de bouquins qui ont du se vendre à si peu d'exemplaires dans ma "monstrueuse" collection dont quelque uns n'ont plu qu'à moi. "Limbo" de Bernard Wolfe par exemple, pourtant il a une certaine renommée et bien tous ceux à qui je l'ai fait lire n'ont pas aimé.
Je suis navré pour toi que "Des parasites comme nous" ait été un désastre, cela doit être dur quand on a choisi un livre de voir que celui ci ne trouve pas son public.

J'ai fini hier soir un vieux PdF "Une longue marche dans la nuit" de Bob Shaw, ça a bien vieilli et j'attaque aujourd'hui "Le dernier chasseur de sorcières" de James Morrow. Dans le genre humour grinçant, du même auteur "En remorquant Jehova" vaut son pesant d'Helix Pomatias.

ed

[Thomas Day]

Je suis navré pour toi que "Des parasites comme nous" ait été un désastre, cela doit être dur quand on a choisi un livre de voir que celui ci ne trouve pas son public.

Dur ? Non...
Ce qui est vraiment rageant c'est perdre de l'argent sur un titre qu'on a publié dans le seul but d'en faire...
Je ne regrette pas de l'avoir publié, je regrette juste de l'avoir payé si cher, ce qui m'empêchera sans doute de publier le prochain.

GD

[hrolf]

Ben il y a beaucoup de passion chez les uns et les autres mais on ne m'otera pas de l'esprit que le problème principal du genre, commercialement parlant, reste le rôle du vendeur... Ce qui serait intéressant c'est de savoir où se vend quoi et pourquoi les librairies générales défendent si mal la SF ?
Les libraires en charge de rayons SF&F sont, la plupart du temps, responsable du rayon policier et n'ont aucune culture SF. Au mieux ils n'y sont pas allergique, au pire le secteur est une corvée et qui dit corvée dit au ramasis de feignasses que nous sommes: comment faire pour faire illusion ? Et là, à mon sens, Bragelonne et son ersatz M. ont bien joué le coup... On n'a plus à réflechir, on empile les séries, on fait vivre ses (sa) table SF sans trop s'y investir, un best-sel' de temps en temps pour faire illusion et hop ! je retourne lire du polar.
Tout celà pour écrire que tant que les libraires ne ferons pas dans ce secteur le travail qu'ils effectuent ailleurs (lit'générale, sciences humaines...) seules les astuces de directeur commercial feront office de sélection.
C'est dommage car même commercialement, le potentiel est là . C'est à vous éditeurs et acteurs de réfléchir aux moyens de convaincre vos revendeurs autrement, de leurs proposés des formations professionelles par exemple...
Si l'on regarde les statistiques de Datalib qui recense les ventes réelles chez près de 170 libraires indépendants on s'aperçoit qu'une poignée de librairie défend correctement le genre, réalise d'honorables ventes par rapport à leur taille. Par exemple pour "l'acroissement mathématique..." de Catherine Dufour seules 44 librairies ont vendu au moins un exemplaire du titre et 6 en ont vendu dix ou plus pour un total de 178 ventes en un an... Perso ça me fait un peu pitié !

Un bâton de pélerin j'vous dit...

[RaphaëlG]

Par exemple pour "l'acroissement mathématique..." de Catherine Dufour seules 44 librairies ont vendu au moins un exemplaire du titre et 6 en ont vendu dix ou plus pour un total de 178 ventes en un an

Seulement 178 ventes en un an ? Non ?!

[Clément]

178 ventes sur les 170 (en fait 148) librairies indépendantes utilisant le logiciel DATALIB et qui considèrent probablement que ce que publie le Bélial' relève de la littérature de gare, je ne trouve que ce n'est pas si mal. Evidemment ce n'est pas représentatif de grand chose au niveau national.