Guère connus sous nos longitudes (mais ça commence à changer), Fábio Moon et Gabriel Bá apparaissent à mes yeux comme deux petits prodiges de la bande dessinée brésilienne. Du second, j'avais déjà lu « The Umbrella Academy », série dont il illustre les scénarios de Gerard Way. Ici, il nous livre un chef-d'œuvre de délicatesse et de pudeur, écrit et dessiné à quatre mains avec son frère Fábio Moon. Une bande dessinée envoûtante dont on garde longtemps en mémoire la thématique douce amère.
Daytripper est l'histoire de Brás de Oliva Domingos. Homme heureux en amour, père aimant, amant comblé et écrivain couronné par le succès, ces éléments laissent présager l'avalanche des clichés inhérents à toute bluette pour midinettes. Ou alors ils entretiennent le doute, faisant croire au quidam que les apparences sont trompeuses. Qu'elles masquent un lourd secret ne demandant qu'à éclore au grand jour...
Eh bien, Daytripper n'est rien de tout cela ! Bien au contraire, la BD de Moon et Bá vous expédie carrément aux antipodes des présupposés que l'on pourrait nourrir à son égard.
À vrai dire, essayer, ne serais-ce que de raconter un peu l'intrigue, ne conduirait qu'à dénaturer la charge émotive portée par le récit. Car Daytripper est l'histoire d'une vie. Et d'une mort. D'ailleurs, peut-être devrait-on plutôt dire de plusieurs morts.
En effet, l'existence de Brás suit une trajectoire erratique, oscillant entre rêve et réalité, entre vie et mort, cherchant sa voie au travers des pièges, fausses pistes et culs-de-sac de la fatalité. L'enfance, l'amitié, l'amour, la famille, la filiation, l'accomplissement par le travail, l'héritage... Par touches successives, Moon et Bá nous livre une petite philosophie de vie par l'image.
On serait bien en mal de déceler quelque chose de pontifiant ou de sentencieux dans leur démarche. Dans des nuances pastels, d'un trait faussement maladroit, empreint d'une grande poésie, le duo exprime simplement, avec sincérité, la multiplicité des possibles animant une existence humaine. Une existence où chaque pas coûte. Où la vie reste indissociable de la mort. Alors, pourquoi se résigner ?
On touche à l'indicible, à une qualité d'émotion indescriptible, à un état d'esprit difficilement transposable en mots. Pourtant, avec un talent admirable et une économie de moyens, Fábio Moon et Gabriel Bá réussissent à restituer l'essentiel de la vie, le tout sans larmoiement excessif.
Bref, on ressort de cette lecture à la fois ému, plongé dans un abîme de sentiments contrastés et, au final, heureux, comme soulagé d'un poids, celui du fardeau de l'existence.
« Quand tu accepteras qu'un jour tu mourras... tu profiteras vraiment de la vie. C'est ça le grand secret. C'est ça le miracle. »
Cette œuvre est un petit miracle je vous dis. Lisez-la ! Et plus vite que cela !!
Daytripper, Fábio Moon et Gabriel Bá
Re: Daytripper, Fábio Moon et Gabriel Bá
J'ai adoré aussi mais ça ne sert à rien que je mette un lien vers mon billet, "Daytripper" m'avait laissée sans voix (ça n'arrive pas souvent).
Maintenant, je la propage, je l'ai déjà offerte deux fois et j'attends un troisième anniversaire pour l'offrir à nouveau. Mes tendances prosélytes refont surface à cause de cette BD...
Maintenant, je la propage, je l'ai déjà offerte deux fois et j'attends un troisième anniversaire pour l'offrir à nouveau. Mes tendances prosélytes refont surface à cause de cette BD...
Re: Daytripper, Fábio Moon et Gabriel Bá
Comme vous aviez tous aimé, j'ai lu. Mais... Bof. C'est bien, sans doute très bien... Mais bof.
Re: Daytripper, Fábio Moon et Gabriel Bá
pascal a écrit :Comme vous aviez tous aimé, j'ai lu. Mais... Bof. C'est bien, sans doute très bien... Mais bof.
J'ai déjà vu cet effet-là chez des personnes à qui on l'avait très fortement recommandé. Je me demande s'il ne faut pas le lire vierge de tout avis sans savoir si c'est bon ou pas (sérieusement). Comme je me suis fait la réflexion, du coup, quand je l'ai offert, je n'ai pas survendu le truc. Mais je pense que ça touche aussi à quelque chose de très personnel, que ça parle à la corde sensibles de certains et n'évoque rien chez d'autre. Ce qui me fait encore plus l'aimer, parce que bon, c'est fatigant les trucs que tout le monde aime pareil, non? ^_^
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