Albin Michel Imaginaire

[FeydRautha]

Bonne pioche, The Stars are Legion a fait beaucoup parler de lui, et Gromo a aimé. Ne l'ayant pas encore lu, je vais peut-être attendre la trad du coup. Enfin, encore une fois, tout dépendra du prix de vente par rapport à la VO, hein ? Parce que parfois ça pique un peu...

[Gilles Dumay - Albin Michel Imaginaire]

Enfin, encore une fois, tout dépendra du prix de vente par rapport à la VO, hein ? Parce que parfois ça pique un peu...

Si c'est pour la papier le prix de vente sera "normal", dans les 23 euros.
Si c'est pour le numérique, normalement 50 à 60% du prix du papier, donc probablement 11,99.

Il faut bien comprendre qu'on met à 25 euros des livres qu'on devrait logiquement (je parle ici de logique industrielle) vendre 29, 32 euros ou plus (j'arrive parfois à des prix de revient unitaires à 40-42 euros).
Le coût des traductions associé à la baisse constante des ventes moyennes (CA total du rayon divisé par nombre de titres publiés chaque année) rend la possibilité de faire des traductions plus difficile chaque année.
La situation est à mon sens paradoxale (et je peux vous promettre qu'elle me fait beaucoup cogiter) ; aujourd'hui un lecteur achète un livre parce qu'il le veut bien, sinon il a cinquante moyens au bas mot pour se le procurer gratuitement, ou au pire pour s'en procurer dix ou cent autres tout aussi gratuitement. Donc (sur une niche comme la nôtre) un éditeur ne demande pas à un acheteur de consommer mais bien de soutenir sa démarche éditoriale (ce qui est symptômatisé par le phénomène de la Pile à lire, les gens ont des piles à lire car ils sont dans une démarche de soutien/de désir intellectuel et non de consommation pure et/ou rationnelle). A partir de là, nos stratégies me semblent vouées à évoluer. Il faut sacraliser l'acheteur, le remercier d'une façon ou d'une autre de l'effort financier qu'il consent pour lire un texte.
J'essaye de budgéter le cadeau de nouvelles aux lecteurs à la sortie des titres, d'organiser des rencontres privilégiées (petit-dèj & co), de trouver tout un tas "d'enrichissements" au livre qui est par essence trop cher, et qui, en papier, n'est pas à son prix réel. Le prix d'un livre traduit a été lentement dé-corrélé de son coût réel (une fois qu'on a payé tout le monde) qui doit dans nos domaines osciller entre 29 et 50 euros. Faire une dichotomie papier/numérique est tentant pour le lecteur qui veut payer moins cher, mais pour l'éditeur c'est la mort ; ce qui compte ce ne sont pas les supports, mais le texte, les coûts de fabrication / distribution / diffusion des divers supports et, au final, la marge. Je conçois l'ensemble comme un tout et je fais donc mes calculs sur 96/4, 96 % de papier, 4% de numérique. A très court terme, je voudrais arriver à 90/10. D'où une politique de prix différente de la politique groupe (70% du prix du papier).

Je pense que pour un économiste, la situation de notre rayon va lui rappeler l'équivalent d'une phénomène de "bulle". La bulle de production est en expansion constante alors que le CA est stable ou diminuant (c'est très compliqué à calculer, parce qu'on ne sait pas ce qu'on prend en compte ou pas : Werber, Chattam, King, le Young Adult, les crowfundings, etc). Comme nous sommes dans la culture, il y a une part d'irrationnel à ça. De nouveaux acteurs arrivent (je suis bien placé pour le savoir) alors que le marché est bien au-delà de la saturation. L'envie d'avoir ou de construire le prochain Game of thrones est plus forte que la logique économique.

GD

[FeydRautha]

Si c'est pour la papier le prix de vente sera "normal", dans les 23 euros.

23 euros, c'est bien. En deçà de la limite psychologique des 25 euros.

Il faut bien comprendre qu'on met à 25 euros des livres qu'on devrait logiquement (je parle ici de logique industrielle) vendre 29, 32 euros ou plus (j'arrive parfois à des prix de revient unitaires à 40-42 euros).

OK, j'avoue que j'ignorais que le différentiel était à ce point élevé. Pour le coup, ça pique vraiment.

Donc (sur une niche comme la nôtre) un éditeur ne demande pas à un acheteur de consommer mais bien de soutenir sa démarche éditoriale (ce qui est symptômatisé par le phénomène de la Pile à lire, les gens ont des piles à lire car ils sont dans une démarche de soutien/de désir intellectuel et non de consommation pure et/ou rationnelle).

Le pari est sévère. Là tu parles vraiment d'un lectorat de niche. La pathologie des PAL, ainsi que la volonté de soutenir une démarche éditoriale, ne doit concerner qu'une poignée de furieux dont nous faisons partie, ou plus ponctuellement les événements types Imaginales ou Utopiales. En tout cas merci de ta réponse détaillée et très éclairante.

Sans parler du prochain Game of Thrones, et à mon tout petit niveau, si je prend comme indicateur le nombre de hits sur mon blog provenant de recherches google spontanées pour Dans la Toile du Temps (de très loin la plus grosse fréquentation enregistrée), on a là un roman qui sort de la niche. Je crois. Tu dois avoir un regard bien plus informé là dessus.

[Apophis]

Je trouve cette politique de sacralisation de l'acheteur, du soutien avéré, très intéressante. Bien plus que celle consistant à distribuer des SP à des gens dont le soutien qu'ils apportent est pour le moins douteux (pas d'achat, donc -puisque tous les livres ou quasiment sont reçus en SP-, pas de critiques de certains des SP reçus -ou 1 an après, ce qui ne sert plus à rien-, et nombre de vues annuel insuffisant pour influencer autre chose que leur grand-mère et ses deux copines de l'EHPAD).

[Gilles Dumay - Albin Michel Imaginaire]

Très sincèrement, on se trompe sur la taille de la niche. D'après mes estimations (trafic sur les sites spécialisés adresses IP unique, coût des campagnes facebook ciblées), 200 000 personnes en France sont réellement intéressées par le genre SF/F, assez du moins pour fréquenter des forums, intervenir sur facebook, acheter régulièrement des livres de genre, en discuter sur la toile (et je mets volontairement de côté la communauté Stephen King). Quand tu dépasses les 3000 ventes, tu commences déjà à toucher de façon notable des gens qui ne font pas partie de ces 200 000 et qui ont tout bêtement acheté le livre en librairie sur un conseil ou pas.
Le problème c'est que les ventes s'éparpillent et se polarisent beaucoup entre succès phénoménaux et désastres phénoménaux.
Les ventes basses sont de plus en plus basses. Et certains auteurs qu'on ignore (pour diverses raisons) font des succès qu'on ignore tout autant jusqu'à mettre vraiment le nez dans les chiffres. J'ai un listing dégressif des ventes GFK de 2017 et c'est assez édifiant.

On me dit l'imaginaire à fait -16% en 2017 (quelque chose comme ça), mais en regardant la liste des titres pris en compte, il en manque plein (dont certains qui ont été critiqués dans Bifrost ; certains qui ont eu un succès notable, disons plus de 5000) parce qu'ils sont référencés en littérature ou en polar, par le voeu de leurs éditeurs respectifs ou d'autres mécanismes.
Et question subsidiaire, les crowfundings on fait +combien-de% en 2017...

GD

[Gilles Dumay - Albin Michel Imaginaire]

Je trouve cette politique de sacralisation de l'acheteur, du soutien avéré, très intéressante. Bien plus que celle consistant à distribuer des SP à des gens dont le soutien qu'ils apportent est pour le moins douteux (pas d'achat, donc -puisque tous les livres ou quasiment sont reçus en SP-, pas de critiques de certains des SP reçus -ou 1 an après, ce qui ne sert plus à rien-, et nombre de vues annuel insuffisant pour influencer autre chose que leur grand-mère et ses deux copines de l'EHPAD).

Tu sais que c'est la croix et la bannière pour que les blogueurs SF/F demandent des SP ?
J'en ai un paquet qui préfèrent une newsletter à un SP.
Plein qui n'osent pas.
D'autres qui pensent qu'il faut forcément faire une bonne critique.

Chez Denoël, j'ai fait pas mal de campagnes à destination des blogueurs, mais même là, j'avais très souvent des "acheteurs" en face de moi.

Moi, ça me dérange pas d'envoyer des SP à des blogueurs, je préfère ça qu'à des journaux qui ne parlent globalement jamais d'imaginaire. Je fais des quotats, les dix premiers donc les dix plus motivés sont servis et puis roule.

GD

[FeydRautha]

Tu sais que c'est la croix et la bannière pour que les blogueurs SF/F demandent des SP ?

Bon sang, ça ne m'a même jamais traversé l'esprit !

[Herbefol]

Et question subsidiaire, les crowfundings on fait +combien-de% en 2017...

Les crowdfunding brassent parfois de gros CA, mais en nombre d'exemplaires ça reste souvent assez "minime". Celui de "l'intégrale" Lovecraft ne représente jamais qu'un peu plus de 5000 contributeurs. Pas plus.

[Gilles Dumay - Albin Michel Imaginaire]

Et question subsidiaire, les crowfundings on fait +combien-de% en 2017...

Les crowdfunding brassent parfois de gros CA, mais en nombre d'exemplaires ça reste souvent assez "minime". Celui de "l'intégrale" Lovecraft ne représente jamais qu'un peu plus de 5000 contributeurs. Pas plus.

Tu as raison, mais tu as vu la valeur du panier moyen...

GD

[Herbefol]

Et question subsidiaire, les crowfundings on fait +combien-de% en 2017...

Les crowdfunding brassent parfois de gros CA, mais en nombre d'exemplaires ça reste souvent assez "minime". Celui de "l'intégrale" Lovecraft ne représente jamais qu'un peu plus de 5000 contributeurs. Pas plus.

Tu as raison, mais tu as vu la valeur du panier moyen...

Oui et au final le CA est pas dégueulasse. Ce CF a fini à presque 400.000 €. Pour un éditeur dont le CA de 2016 était de 450.000 €, ça fait une sacrée rentrée d'argent.