thomasday a écrit : On a cinq ans pour accompagner cette nouvelle technologie, et je ne suis pas d'avis
de verser de l'eau bouillante sur des glaçons, histoire juste de voir ce qu'il advient des glaçons.
Ta position est intelligente et très raisonnable, compte tenu de ta position. Je suis bien conscient
du fait que tu es l'un des rares éditeurs à avoir véritablement réfléchi à la question, poussé la
corporation à la prendre en compte, et favorisé des expériences importantes (ce n'est certainement
pas par hasard si les deux livres qui ont servi de déclencheur à ce fil sont l'un un roman de Roland
Wagner, militant anti-Hadopi, anti-DRM, et adepte des Creative Commons, l'autre un roman de
Thomas Day).
Pour autant, je suis bien certain qu'elle serait très différente dans un autre contexte professionnel.
Il me semble que notre principale différence d'analyse réside dans la nature de ces "cinq ans".
Pour toi — mais j'ai entendu Stéphane Marsan dire à peu près la même chose — c'est au-delà
de l'horizon et, du moment que les éditeurs en place "accompagnent" habilement l'émergence de
l'e-book et évitent d'être entièrement largués techniquement, il sera temps d'agir commercialement
à ce moment-là. L'expérience passée montre que ceux qui se sont précipités ont eu tort, la techno
et le modèle commercial étant jusqu'ici immatures. Je pense en revanche, comme Herbefol et
Sossa, qu'un cap est en train d'être franchi, et que les choses vont désormais bouger très vite.
Dans deux ou trois ans, de nouveaux acteurs seront apparus, et pas des moindres (Apple
comme distributeur !) et il y aura déjà quelques cadavres.
Il est certainement possible de fausser la concurrence et de donner aux acteurs français du
livre les cinq ou dix ans de répit qu'ils souhaitent. Mais là, le risque, ce n'est plus de bousculer
quelques positions établies : ce serait le basculement de toute une génération de lecteurs vers
le marché anglo-saxon, voire la disparition complète du livre de leur paysage.
Un point plus rassurant, à mon sens, est que ces questions affectent les structures commerciales,
beaucoup moins les hommes. Quel que soit le modèle, dans cinq ou dix ans, il y aura toujours
des auteurs et de bons éditeurs, y compris ceux d'aujourd'hui.