PHILIPPE CADUC a écrit :Est-ce vous diriez que leurs univers sont comparables ?
Excellente question !
Mélanie Fazi est clairement sous influence de
Lisa Tuttle (donc logiquement quand on aime l'une on aime l'autre), mais elle a quand même sa personnalité (heureusement), peut-être parce qu'elle est aussi influencée par
Stephen King.
Dans mon souvenir (il faudrait que je confirme tout ça en relisant),
Lisa Tuttle est plus proche de la ghost story anglaise classique, en ce notamment qu'elle pose (plus ouvertement il est vrai) la question de la place des femmes dans la société ; il me semble que
Mélanie Fazi passe insidieusement de cette problématique à celle (plus générale) de la place des marginaux dans la société (la thématique de la monstruosité est plus forte chez elle me semble-t-il, même si elle ne prend pas forcément des formes spectaculaires).
On voit aussi chez
Mélanie Fazi des lieux qu'on ne voyait pas avant dans le récit fantastique, comme une salle de concert ("Matilda", sa troisième nouvelle publiée sauf erreur de ma part, et sa première vraie réussite, qui ouvre
Serpentine) ou un salon de tatouage ("Serpentine"), voire une aire d'autoroute ("Nous reprendre à la route") ou un "Train de nuit" (et j'en oublie sans doute).
Je ne sais pas ce qu'en penseraient les deux autrices elles-mêmes ; tout ça est sans doute discutable, d'autant que
Mélanie Fazi fait tout autant que
Lisa Tuttle du fantastique intimiste.
En revanche, ce qui est sûr, c'est que l'omnibus regroupant les 3 recueils de
Mélanie Fazi (auquel il faudrait adjoindre quelques nouvelles dont recueillies, y compris "La Clé de Manderley") représente un pan majeur du fantastique, à côté duquel tout vrai amateur du genre ne peut se permettre de passer (accessoirement, c'est sans doute l'ouvrage que je choisirai d'emmener dans une île déserte, enfin si je parviens à me défaire de l'idée que Bragelonne c'est le mal ^_^).
Franchement, il suffit de prendre l'incipit d'une nouvelle au hasard pour avoir envie de la lire... Et comme j'en connais certaines par coeur, un petit aperçu, le début de "La cité travestie" :
Mélanie Fazi a écrit :La cité travestie ne dort jamais. Ses insomnies sont contagieuses.